Le jour où j’ai appris que je serais mère, je me suis mise à tout planifier, dans tous les domaines. La chambre, les meubles, baisser ma consommation de cochonneries (lire chips)… tout y passait. Je n’allaiterais pas, il n’en était tout simplement pas question. Mon bébé, je lui apprendrais à vivre! Je serais la mère, après tout! Et… je demanderais une camera vidéo à ma famille pour Noël, car je ne voulais absolument rien manquer de l’évolution de ma petite crevette après son premier souffle. Mais, surtout, je voulais qu’elle ait des souvenirs, car j’ai toujours été curieuse de voir comment moi je parlais, bougeais… quand j’étais une mini!
Puis, mon ventre a commencé à pousser et je me sentais devenir incroyablement calme! Moi, jeune femme au tempérament nerveux, qui ai peur de tout et qui paniquais à l’idée de voir la trentaine approcher, je devenais TOTALEMENT zen… Ce bébé qui grandissait en moi faisait aussi évoluer une partie de moi que je ne connaissais que peu et ça me faisait le plus grand bien. Moi qui avais une peur bleue de l’accouchement avant de tomber enceinte, je voyais maintenant cette étape approcher sans même un petit frisson d’effroi. Mais qui étais-je devenue?
Mon mari tentait tant bien que mal de me faire comprendre que l’allaitement était LE choix à prendre. Il m’a donc emmenée à la pharmacie et m’a montré le prix d’une caisse de Préparation commerciale pour nourrissons. Je ne voulais pas de pression, je sentais qu’il insistait beaucoup et ça, ça éveille mon esprit de contradiction.
Arrivèrent les cours prénataux. L’infirmière nous a montré une vidéo d’accouchements. J’ai fermé les yeux aux moments de chacune des délivrances, car je ne voulais pas nuire à ma zénitude qui voyait ce moment comme une étape importante qui ne doit pas nous effrayer. (Je ne regretterai jamais cette décision.) Elle nous a parlé de l’allaitement versus les PCN. Et c’est avec son tableau de comparaisons qu’une petite graine a été semée dans mon esprit meublé de paradoxes. (Plus tard, quand mon médecin me demandera si je souhaite allaiter, je lui répondrai que oui, mais que je ne m’acharnerai pas.)
“Un bébé ne manipule pas, il mentionne avec son seul moyen de communication qu’il a un besoin à combler!” Hey, dis-je à mon mari… là-dessus, l’infirmière ne me convaincra pas. Il n’est pas question que je me lève la nuit passé ses 6 mois quand même…
Le jour J est finalement arrivé. J’ai eu un accouchement très rapide pour un premier bébé (20 minutes) quoique blessant, ma fille étant née en dystocie des épaules. (les épaules à l’horizontale).
Arriva la première tétée… Les infirmières de l’hôpital qui disent que bébé doit boire au 2 heures dans chaque sein, chacune ayant sa position préférée à vous faire adopter alors que vous venez tout juste de comprendre la précédente… Puis, il y a le retour à la maison. Bébé qui pleure et qui régurgite constamment, maman qui panique et ne sait plus quoi faire, tentant de consoler cette petite chose aux traits émouvants et magnifiques.
Je me suis donc mise à lire beaucoup sur l’allaitement. J’ai appris que là où les horloges n’existent pas, les coliques sont moindres et que si seul le lait de début de tétée était pris, le taux de sucre et le peu de gras pouvaient donner des crampes.
Ce jour-là, j’ai cessé de regarder l’heure et ne donnai qu’un sein par boire, dans le but que Mini-Moi prenne tout ce qu’il y avait à prendre, car j’avais assez de lait pour nourrir un étage de maternité à l’hôpital. Ma poupée a cessé de se tordre et de pleurer. Du jour au lendemain.
Pour les pleurs de bébé, j’étais tout simplement incapable de la laisser faire sans intervenir. Mon niveau de stress aurait été bien trop élevé à la laisser faire. Je me rendais à elle, la prenais dans mes bras, la berçais ou la promenais, lui chuchotais que maman était là quand la raison de ses pleurs était inconnue et je profitais de son petit corps blotti tout contre le mien.
Bien entendu, les propos de ce texte n’impliquent que moi… Mais, pour moi, laisser les choses aller dans l’ère du temps, ce fut une révélation. Mes convictions d’avant maternité se sont toutes effondrées l’une après l’autre pour me permettre de réaliser que l’instinct est là pour nous aider et que nous ne l’écoutons pas assez dans ce monde de rapidité, de technologies et de performances. J’allaite encore ma deuxième qui a 3 ans. Elle saura me dire quand elle sera prête à arrêter! Et je suis incapable de laisser pleurer mes filles sans les prendre dans mes bras ou leur tenir la main.
Je suis ZEN… sauf quand vient le temps de les filmer… Vite, la camera en main, je ne veux rien manquer!